Information et veille juridique en droit de l'Union européenne

Jurisprudence communautaire, décembre 2012

 

La concurrence dans l'attribution des marchés publics doit être assurée

Les directives européennes qui régissent l'attribution des marchés publics font obligation de recourir (sauf exceptions) à des procédures garantissant la transparence et la concurrence afin qu'il n'y ait pas de favoritisme.

C'est en particulier ce que prévoit la directive 2004/18 du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services. Et c'est de la violation de cette directive que la Cour de Justice de l'Union européenne a été saisie en 2011.

La question posée était celle de savoir si la réglementation italienne qui autorise les administrations publiques à conclure entre elles des accords de coopération dans des activités présentant un intérêt commun, sans appel à la concurrence, est contraire aux règles communautaires. En l'espèce, une agence sanitaire locale (ASL) avait approuvé un cahier des charges confiant à une université d'une mission d’étude, rémunérée, sur la vulnérabilité sismique des structures hospitalières de la région. Des entreprises et des associations professionnelles avaient contesté la procédure et la juridiction italienne saisie du litige avait renvoyé l'affaire devant la cour de justice de l'UE.

La réponse de celle-ci dans un arrêt du 19 décembre 2012 donne raison aux demandeurs: le droit de l’Union en matière de marchés publics interdit une réglementation nationale qui autorise la conclusion entre entités publiques, sans appel à la concurrence, de contrats de coopération ne mettant pas en oeuvre un service public commun et susceptibles d’assurer une situation privilégiée à un éventuel prestataire privé.

Le raisonnement du juge est le suivant: un contrat à titre onéreux conclu par écrit entre un opérateur économique et un pouvoir adjudicateur constitue bien un marché public même si l'opérateur (l'université en l'occurence) est lui-même un pouvoir adjudicateur et que son activité principale n'a pas de caractère lucratif (jurisprudence constante de la CJUE).

L'exception prévue au profit des contrats instaurant une coopération entre des entités publiques et assurant la mise en oeuvre d’une mission de service public commune ne peut être invoquée pour justifier que la reglementation européenne ne s'applique pas. Car, explique la Cour, le contrat de coopération contesté „comporte un ensemble d’aspects matériels dont une partie importante, voire prépondérante, correspond à des activités généralement effectuées par des ingénieurs ou des architectes et qui, bien qu'elles soient basées sur un fondement scientifique, ne s’apparentent cependant pas à la recherche scientifique. Par conséquent... la mission de service public qui fait l’objet de la coopération entre des entités publiques instaurée par ledit contrat ne paraît pas assurer la mise en œuvre d’une mission de service public qui est commune à l’ASL et à l’université“ (considérant 37).

Enfin, ce contrat „pourrait conduire à favoriser des entreprises privées, si les collaborateurs extérieurs hautement qualifiés auxquels il autorise l’université à recourir pour la réalisation de certaines prestations, englobent des prestataires privés“. C'est au tribunal italien de vérifier ce point (considérant 38).

CJUE, 19/12/2012, aff.C-159/11, Azienda Sanitaria Locale di Lecce e.a./ Ordine degli Ingegneri della Provincia di Lecce e.a

 

La Cour précise les conditions à remplir par une demande d'injonction de payer européenne

Connue au plan national, la procédure d'injonction de payer a son équivalent européen depuis que le règlement n° 1896/2006 du 12 décembre 2006 l'a instituée. Le but est le même : simplifier, accélérer et réduire les coûts de procédure dans des litiges portant sur des créances pécuniaires mais la procédure européenne s'applique aux litiges transfrontaliers.

Le règlement précise les éléments que doit comprendre une demande d’injonction de payer européenne et un formulaire standard permettant de délivrer une injonction de payer européenne est annexé au texte.

Que se passe-t-il si une demande d'injonction de payer européenne remplit toutes les conditions prévues par le règlement mais pas celles exigées par une loi nationale?

Cette question a été réglée par un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 13 décembre 2012

Le juge communautaire y rappelle que le règlement, s'il ne se substitue pas aux procédures nationales de recouvrement des créances, a pour objectif de créer un mécanisme uniforme de recouvrement et que cet objectif serait compromis si les lois nationales pouvaient prescrire des exigences additionnelles devant être remplies par la demande d’injonction de payer européenne. Par conséquent il faut considérer que cette législation européenne règle de manière exhaustive les conditions qu’une demande d’injonction de payer européenne doit remplir.

La Cour examine ensuite la question de l'espèce qui était de savoir si le créancier peut réclamer, outre sa créance, des intérêts jusqu’à la date du paiement du principal de sa créance. Sans trancher la question, qui relève du juge national faute de disposition dans le règlement, le juge communautaire indique cependant la réponse à donner en observant que celui-ci non seulement ne s’y oppose pas, mais qu' „une interprétation... du règlement n° 1896/2006 ne permettant pas de réclamer les intérêts ayant couru jusqu’à la date du paiement du principal serait susceptible d’accroître la durée et la complexité de la procédure européenne d’injonction de payer et d’en augmenter les coûts“ (considérant 46) ce qui "serait susceptible de dissuader le demandeur d’engager une procédure européenne d’injonction de payer et de l’inciter à recourir plutôt aux procédures nationales lui permettant d’obtenir l’intégralité des intérêts" (considérant 47) et contreviendrait au but poursuivi par la création de l'injonction européenne de payer.

CJUE, 13/12/2012, aff. C-215/11, Iwona Szyrocka / SiGer Technologie GmbH

 

Le Parlement européen prié de siéger en France

Voila que la Cour de justice de l'Union européenne est de nouveau sollicitée pour dire le droit dans la „guerre“ du siège du Parlement européen. Tel un marronnier médiatique, cette question ressurgit de façon périodique. Elle oppose les partisans du siège double actuel (à Strasbourg qui est le siège officiel en vertu du traité et à Bruxelles) et ceux qui veulent un siège unique (à Bruxelles) au nom des économies budgétaires et de la lutte contre les tracas et surcharges de travail inutiles que causent les fréquents déplacements des eurodéputés entre Bruxelles (où sont les commission parlementaires) et Strasbourg (où se tiennent les sessions plénières de l'assemblée).

Dans les défenseurs du siège unique on trouve le Royaume-Uni et dans ceux du statu quo la France, qui on l'imagine, s'insurge dès que la fixation du siège à Strasbourg est contestée. Comme il fautrait réviser le traité pour changer cette localisation et que cette révision ne peut être faite qu'à l'unanimité, le déménagement est impossible tant que la France s'y oppose.

Plusieurs moyens ont alors été envisagés pour tenter de contourner l'obstacle et le Parlement européen a mis au point une „astuce“ consistant à découper les sessions plénières pour, au moins, limiter les aller retours entre Bruxelles et Strasbourg au détriment de cette dernière ville.

Le traité dispose que le Parlement se réunit en douze périodes de sessions plénières mensuelles par an sans préciser la durée de ces périodes de sessions plénières. Il est de tradition (validée par la jurisprudence de la Cour) que les périodes de sessions plénières ordinaires, d’une durée de quatre jours, se tiennent à Strasbourg, alors que les périodes de sessions additionnelles ont lieu à Bruxelles et que deux périodes de sessions plénières ont lieu à Strasbourg au cours du mois d'octobre pour compenser l’absence de session plénière en août. Mais en 2011, le Parlement a adopté des délibérations pour modifier le calendrier des périodes de sessions pour 2012 et 2013: pour les mois d'octobre 2012 et 2013, une des deux périodes de sessions plénières de quatre jours prévues pour chacun de ces mois a été supprimée et, d’autre part, les périodes de sessions plénières d’octobre 2012 et d’octobre 2013 restantes ont été scindées en deux (deux périodes de sessions plénières distinctes, de deux jours chacune, ont été prévues au cours de la semaine des 22-25 octobre 2012, et deux durant la semaine des 21-24 octobre 2013).

Evidemment, l'“astuce“ n'a pas été du goût du gouvernement français qui a saisi la Cour de justice de l'UE pour lui demander d'annuler les délibérations en faisant valoir qu'elles violent les traités et la jurisprudence de la Cour.

C'est chose faite avec l'arrêt du 13 décembre 2012 qui constate que les périodes de sessions prévues par les délibérations pour octobre 2012 et octobre 2013 ne répondent pas aux exigences fixées par les traités sur le siège des institutions. Les périodes de sessions plénières d’octobre 2012 et 2013, scindées en deux par le Parlement, ne peuvent être qualifiées individuellement de périodes de sessions plénières mensuelles, explique le juge : „En effet, par rapport aux périodes de sessions plénières ordinaires, le temps effectif disponible pour les périodes de sessions au cours de ce mois est réduit de plus de la moitié“ (considérant 56).

Certes, la compétence des états pour fixer le siège du Parlement doit tenir compte de la compétence d’organisation interne de celui-ci. Mais la Cour rejette les arguments présentés par le Parlement pour justifier ses délibérations par son pouvoir d’organisation interne. Ni l’accroissement continu des compétences de l'assemblée, ni les inconvénients et les coûts engendrés par la pluralité des lieux de travail ne peuvent être retenus. Les délibérations sont donc annulées...jusqu'à la prochaine offensive.

CJUE, 13/12/2012, aff.jointes C-237/11 et C-238/11, France / Parlement

 

Pas de discrimination dans l'aide à l'embauche entre chomeurs de différents états membres

La reconnaissance et l'exercice des droits tirés de la liberté de circulation des personnes dans l'Union européenne sont la source d'un contentieux abondant qui souvent, conduit à la saisine de la Cour de justice de l'Union européenne. Les états ont en effet toujours tendance à vouloir réserver un traitement privilégié à leurs nationaux, ce qui n'est plus toujours possible.

Ainsi, l'octroi aux employeurs d'une aide pour inciter à l'embauche de chômeurs de plus de 45 ans ne peut être subordonné à la condition que le chômeur soit inscrit au bureau de placement de l’emploi d'u pays qui attribue cette aide, alors que cette inscription est réservée à ses résidents.

En l'espèce une société luxembrougeoise qui avait engagé en contrat de travail à durée indéterminée une quinquagénaire au chomage s'était vu refuser le rempoursement des cotisations de sécurité sociale prévu au terme de la législation luxembourgeoise. Le motif de ce refus était que la nouvelle employée n'était pas inscrite comme demandeur d’emploi auprès du bureau de placement de l'Administration de l'emploi (« ADEM ») luxembourgeoise. Et pour cause: seules les personnes qui résident au Luxembourg peuvent s'inscrire. Ce n'était pas le cas de Mme Schmidt-Krier qui, bien que ressortissante luxembourgeoise et ayant fait toute sa carrièree dans ce pays, habitait en Allemagne.

Pour la Cour, la réglementation luxembourgeoise en matière d'aide à l'embauche apparaît contraire à la libre circulation des travailleurs car le principe communautaire de libre circulation des travailleurs a pour but de faciliter pour les ressortissants des pays membres, l'exercice d'activités professionnelles de toute nature sur tout le territoire de l'Union européenne. Par conséquent, les états ne peuvent prendre des mesures qui introduisent une différence de traitement entre, d’une part, les ressortissants européens à la recherche d'un emploi qui résident sur leur territoire et les ressortissants égalemet en recherche d'emploi qui résident dans un autre pays membre.

CJUE, 13/12/2012, aff.C-379/11, Caves Krier Frères Sàrl / Directeur de l'Administration de l'emploi

 

Obligation de diffusion des compétitions sportives majeures sur des télévisions à accès libre

La Fédération internationale de football association (FIFA) organise la phase finale de la Coupe du monde de football (« la Coupe du monde ») et l'Union des associations européennes de football (UEFA) organise le championnat d'Europe de football (l' « EURO »). Une part importante de leurs revenus provient de la vente des droits de retransmission télévisuelle de ces compétitions. Or, leur cagnotte risque d'être réduite par la décision prise par la Belgique et le Royaume-Uni. Se fondant sur le droit communautaire (Directive 89/552 du 3 octobre 1989, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l’exercice d’activités de radiodiffusion télévisuelle), qui permet aux états d'interdire la retransmission exclusive des événements qu'ils jugent d'une importance majeure pour leur société, si une telle retransmission prive une partie importante du public de la possibilité de suivre ces événements sur une télévision à accès libre, la Belgique et le Royaume-Uni ont établi une liste des événements considérés comme ayant une importance majeure pour leur société. Pour la Belgique, la liste contenait tous les matchs de la phase finale de la Coupe du monde et, pour le Royaume-Uni, l'ensemble des matchs de la phase finale de la Coupe du monde et de l'EURO. Elles ont été envoyées à la Commission qui a décidé qu'elles étaient compatibles avec le droit de l’Union.

Voila qui ne fait pas l'affaire de la FIFA et de l'UEFA qui ont attaqué ces décisions devant le Tribunal en contestant le fait que tous ces matchs puissent constituer des événements d'importance majeure pour le public. Après que le tribunal ait rejeté leurs recours, elles se sont pourvu devant la Cour de justice de l'Union européenne.

Dans ses conclusions du 13 décembre 2012, l'avocat général recommande à la Cour de rejeter les pourvois dans leur intégralité.

12/12/2012, Conclusions de l'avocat général dans les affaires C-201/11 P, C-204/11 P et C-205/11 P UEFA et FIFA / Commission

 

Validité juridique de la coopération renforcée instaurée pour créer le brevet unitaire européen

En mars 2011, le Conseil a autorisé une coopération renforcée en vue de créer une protection des inventions par brevet unitaire entre 25 États membres (sur les 27 de l’Union). La voie de la coopération renforcée avait été choisie faute de pouvoir obtenir un accord de tous les états membres aux terme d'années de négociations.

L'Espagne et l'Italie seules ont refusé d’y participer mais elles ont contesté devant la Cour de justice de l'Union européenne la validité de la décision du Conseil dont elles demandent l'annulation. Les moyens invoqués à l'appui du recours sont:

  1.  

    L'incompétence du Conseil pour prendre une telle décision : la création d’un brevet unitaire relèverait des compétences exclusives de l’Union et, notamment, de l’établissement des règles de concurrence nécessaires au fonctionnement du marché intérieur. Or, les États membres ne peuvent exercer une coopération renforcée que dans les domaines relevant de la compétence non exclusive de l’Union. L'argument est réfuté par l'avocat génral dans ses conclusions présentées le 11/12/2012: la création d'un brevet attestant une propriété intellectuelle relève du marché intérieur, qui est une compétence partagée entre l’Union et les États membres.

  2.  

    Le Conseil se serait livré à un détournement de pouvoir. Mais les coopérations renforcées, rappelle l'avocat général, ont pour but de favoriser la réalisation des objectifs de l’Union, de préserver ses intérêts et de renforcer son processus d’intégration. En l'espèce, le Conseil n'a fait qu'utiliser un outil que lui confèrent les traités pour surmonter un blocage.

  3.  

    la décision viole le système juridictionnel de l’Union, car elle ne précise pas le régime juridictionnel envisagé en matière de brevet unitaire. Mais selon l'avocat général, la création d’un système juridictionnel propre aux brevets unitaires ne fait pas partie des conditions requises par les traités pour la mise en oeuvre d’une coopération renforcée, l’autorisation donnée par la décision du Conseil pour la mise en place d’une coopération renforcée n'étant que la prémisse de l’adoption d’autres actes législatifs pour en assurer la mise en oeuvre concrète.

Le Conseil a méconnu la condition du dernier ressort requise pour instaurer une coopération renforcée (celle-ci est en quelque sorte, un solution „ultime“ quand les autres moyens de parvenir aux objectifs recherchés dans un délai raisonnable ont échoué). Mais, observe l'avocat général, les traités ne définissent ni la condition du dernier ressort ni la notion de délai raisonnable. Selon lui, le dernier ressort peut très bien être le constat de l’existence d’un véritable blocage qui pourrait survenir à tous les niveaux du processus législatif et qui atteste de l’impossibilité d’aboutir à un compromis, sans qu'il soit nécessaire d'attendre la fin du processus législatif et le rejet d'une proposition de loi.

La décision du Conseil porterait atteinte au marché intérieur et à la cohésion économique, sociale et territoriale, elle constituerait une entrave et une discrimination aux échanges entre les États membres et elle provoquerait des distorsions de concurrence entre ceux-ci. Cette crainte est prémlaturée, oibjecte l'avocat général qui rappelle que le contrôle juridictionnel de la décision d’autorisation ne peut pas se confondre avec le contrôle des actes adoptés par la suite pour son application.

Les compétences, les droits et les obligations des États pays qui ne participent pas à la coopération renforcée sont méconnus. Là encore, l'avocat général réfute ce sixième et dernier moyen et propose dans ses conclusions de rejeter le recours de l'Espagne et de l'Italie.

11/12/2012, Conclusions de l'avocat général dans les affaires jointes C-274/11 et C-295/11, Espagne et Italie / Conseil

 

Sanction du séjour irrégulier

Les normes et les procédures que doivent appliquer les états membres pour régir le séjour irrégulier sont énoncées dans la directive 2008/115 du 16 décembre 2008, aussi connue sous le nom de "directive retour".

En Italie, la loi prévoit que le séjour irrégulier de migrants venant de pays tiers peut être sanctionné par une amende ou, dans des conditions définies, par l'expulsion ou l'assignation à résidence.

Cette loi est-elle contraire à la directive?

Dans un arrêt du 06 décembre 2012, la Cour de justice de l'Union européenne rappelle tout d'abord que la directive n'harmonise pas intégralement les règles applicables et que par conséquent les états restent libres de la compléter par exemple en qualifiant de délit le séjour irrégulier et en le sanctionnant pénalement. Mais, ce faisant, les états doivent veiller à ce que les règles qu'ils adoptent et appliquent ne portent pas atteinte à l’application des normes et des procédures communes prévues par la directive et priver ainsi celle-ci de son effet utile.

Or celle-ci prévoit qu'un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d'un état memere doit faire l'objet d'une décision de retour selon des modalités et des conditions définies.

Un état membre peut donc sanctionner le séjour irrégulier d'une peine d'amende ou par une peine d'expulsion. Par contre, il ne peut pas sanctionner le séjour irrégulier d'une peine d’assignation à résidence, qui pourrait entraver la mise en oeuvre de la procédure de retour du migrant dans son pays.

CJUE, 06/12/2012, aff.C-430/11 Md Sagor

 

Pas d'indemnité de licenciement pour des travailleurs proches de la retraite

Voila qui va plaire aux syndicats: dans un arrêt du 06/12/2012 la Cour de justice de l'Union européenne admet, elle pourtant si pointilleuse sur l'application du principe de non discrimination, que des travailleurs proches de l'âge de la retraite peuvent toucher des indemnités inférieures à celles prévues par un plan social pour les autres travailleurs licenciés.

En l'espèce, le plan social conclu entre une entreprise allemande, Baxter, et son comité d’entreprise prévoyait que le montant de l’indemnité versée aux travailleurs licenciés pour motif économique était calculé selon une méthode standard fondée, notamment, sur l'ancienneté dans l’entreprise. Mais ce plan prévoyait aussi une méthode de calcul „alternative“ pour les travailleurs âgés de plus de 54 ans, en fonction de la première date possible de leur départ à la retraite. L’indemnité à verser à ces travailleurs se trouvait être inférieure au montant de celle qui aurait résulté de la méthode standard (le plan imposait toutefois qu'elle devait être au moins égale à la moitié de celle-ci).

Un salarié mécontent avait contesté le plan en justice et la Cour de justice de l'Union européenne avait été saisie par la juridiction allemande d'une question préjudicielle pour savoir s'il y avait violation du principe de non discriminatation protégé par le droit communautaire (Directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000 qui interdit la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, l'handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle, dans l'accès à l'emploi et dans le travail).

Selon la Cour, il n'y a pas violation du principe de non discrimination dans l'espèce qui lui est soumise car la différence de traitement établie par le plan social peut être justifiée par l’objectif d’octroyer une compensation pour l’avenir, de protéger les travailleurs plus jeunes et d’aider leur réinsertion professionnelle, tout en tenant compte de la nécessité d’une juste répartition des moyens financiers limités d’un plan social. De plus, ajoute la Cour, il est légitime d’éviter qu’une indemnité de licenciement ne bénéficie à des personnes qui ne cherchent pas de nouvel emploi, mais vont percevoir un revenu de substitution prenant la forme d’une pension de vieillesse. Enfin, rappelle la Cour, la réglementation en cause est le fruit d’un accord négocié entre les représentants des employés et ceux des employeurs, ceux-ci ayant exercé leur droit de négociation collective reconnu en tant que droit fondamental. Le fait de laisser ainsi aux partenaires sociaux le soin de définir un équilibre entre leurs intérêts respectifs offre une souplesse, chacune des parties pouvant, le cas échéant, dénoncer l’accord.

CJUE, 06/12/2012, aff.C-152/11, Johann Odar/ Baxter Deutschland GmbH

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