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Accord sur le règlement qui fixe la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I)

 

Pour que le marché intérieur fonctionne et que la liberté de circulation des personnes et des biens soit effective, encore faut-il que les obstacles aux échanges transfrontaliers soient levés.

Or, l’existence d’une incertitude sur la loi applicable en cas de litige transfrontalier, par exemple lorsqu’un consommateur achète un bien à une entreprise d’un autre pays membre que le sien, peut constituer un tel obstacle : quel droit régit le contrat ? Celui du pays du consommateur ou celui du pays de l’entreprise ?  Il existe des règles de droit international privé qui permettent de résoudre cette difficulté. Ces règles ont été reprises et progressivement adaptées dans le cadre de l’Union européenne.

Lors de la réunion de Tampere les 15 et 16 octobre 1999, le Conseil européen a fait du principe de reconnaissance mutuelle des décisions de justice une action prioritaire pour la création de l’espace de justice européen (troisième pilier de l’Union européenne) (1).

Jusqu’à cette date, le texte applicable était la Convention de Bruxelles de 1968 relative à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des jugements en matière civile et commerciale. Ce texte contient des dispositions qui donnent au demandeur le choix du tribunal devant lequel porter son recours d’où la tentation fréquente de choisir le tribunal d’un Etat dont la loi lui serait la plus favorable. C’est pour éviter cette dérive qu’avait  été signée la Convention de Rome qui détermine quelle est la loi qui devra être appliquée selon le type de litige (Convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles ouverte à la signature le19/06/1980 à Rome).

Le traité d’Amsterdam, qui a communautarisé une partie du troisième pilier a facilité l’adoption de textes communautaires de droit international privé qui se substituent aux Conventions. Tel est le cas, notamment, du règlement  44/2001 qui a remplacé la Convention de Bruxelles (aussi appelé Règlement Bruxelles I) ou encore du règlement  864/2007 du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles («Rome II»). Il ne s’agit pas d’adopter un droit  civil européen mais d’indiquer quel droit national s’applique selon les circonstances.

Le Parlement européen a adopté le 29/11/2007  la proposition de règlement sur la loi applicable aux obligations contractuelles ayant un caractère transfrontalier qui permet de compléter cet ensemble de textes (2). Il remplacera la Convention de Rome de 1980.

Le texte adopté est le résultat  d'un accord négocié avec le Conseil en vue d'une adoption dès la première lecture.

Le règlement exclut de son champ d’application les obligations résultant des liens familiaux, du régime matrimonial, des legs et successions.

Il reconnaît aux parties la liberté de choisir la loi applicable au contrat dans de nombreuses matières, les règles de conflit des lois prévues par le règlement ne s’appliquant qu’en l’absence d’un tel choix.

Ainsi, par exemple :

  • Le contrat de vente de biens est régi par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle
  • Le contrat de prestation de services est régi par la loi du pays dans lequel le prestataire de service a sa résidence habituelle
  • Le contrat ayant pour objet un droit réel immobilier ou un bail d'immeuble est régi par la loi du pays dans lequel est situé l'immeuble . Il existe cependant une exception pour le bail d'immeuble conclu en vue de l'usage privé temporaire pour une période maximale de six mois consécutifs. Celui-ci est régi  par la loi du pays dans lequel le propriétaire a sa résidence habituelle, à condition que le locataire soit une personne physique et qu'il ait sa résidence habituelle dans ce même pays.

Certains types de contrats font l’objet de dispositions particulières.

C est le cas des contrats individuels de travail. Le règlement prévoit que les parties pourront déterminer le droit applicable. On se demande alors quelle peut être  la marge de négociation de l’employé si la situation du marché du travail est tendue. A cette question implicite, le règlement apporte une réponse en précisant que la liberté de choix ne pourra avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurerait l’application de la loi qui aurait été applicable à défaut de choix, à savoir la loi du pays où le travailleur a son lieu de travail habituel, ou à défaut celle du pays dans lequel se trouve l’employeur. 

Dans d’autres types de contrats, l’autonomie des parties est écartée  afin d’éviter des choix  uniquement opportunistes. Mais des exceptions sont cependant prévues.

C’ est ainsi que le droit applicable aux contrats entre un consommateur et un professionnel est déterminé par le règlement. En règle générale, le choix de la juridiction devra favoriser le consommateur. Concrètement, le droit applicable sera celui avec lequel le consommateur est le plus familiarisé, donc celui du pays où il réside habituellement. Mais alors que la Commission européenne prévoyait dans la proposition initiale la généralisation du principe de « la loi du consommateur », sous réserve de quelques exceptions, le Parlement a réduit la portée de cette disposition par un amendement au motif qu’une telle règle obligerait les commerçants surtout électroniques à « prévoir des conditions contractuelles taillées sur mesure pour chaque État membre de l'Union. Cela aurait été inabordable pour les petites et moyennes entreprises qui ne disposent pas des mêmes ressources que les grandes multinationales », observait le rapporteur du texte, Christian Dumitrescu (3). L’amendement parlementaire élargit donc le champ d’application de la liberté de choix des parties.  Concrètement, dans la mesure où des contrats entre consommateurs et professionnels sont des contrats types à prendre ou à laisser (ce qui est le cas fréquent dans le commerce électronique), les commerçants pourront imposer leur loi.

Le Conseil a adopté à son tour le règlement le 07/12/2007.

10/12/2007

 

Sujets liés :

Procédure européenne d'injonction de payer

Loi applicable aux litiges transfrontaliers (Rome II) : la Commission européenne revoit sa copie

 


 

1 - Voir l'étude consacrée à la présentation de l'Union européenne

2 - Parlement européen, 29/11/2007, loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I)

3 – Débat du 29/11/2007, intervention de M.Christian Dumitrescu

 

 

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