Information et veille juridique en droit de l'Union européenne

Si la France sortait de l'Union Européenne…

 

Le programme du front national est clairement hostile à la construction européenne. Il prévoit de :
- dénoncer les Traités de Maastricht, Schengen et Amsterdam, donc de remettre en cause l'appartenance de la France à l'Union Européenne (pour une présentation des différents traités et de la réalité qu'ils recouvrent, voir sur ce site : Documents, Présentation de l'Union européenne) et notamment de revenir sur la libre circulation,
- retourner au franc,
- abroger la révision constitutionnelle permettant le vote des étrangers (qui concerne, rappelons-le, les élections locales),
- supprimer la Commission de Bruxelles.

Sans entrer dans le débat idéologique, cet article a pour but de s'interroger sur la faisabilité de ces propositions et sur les conséquences qu'aurait leur mise en œuvre. Un rappel de quelques réalités s'impose.

La première question qui se pose est donc celle de la possibilité de sortir de l'Union .

Juridiquement, une première certitude existe :aucune clause des traités européens ne prévoit cette possibilité. Mais il est tout aussi clair qu'une telle décision relève en dernier lieu de la souveraineté d'un état que l'on ne peut lui interdire d'exercer (sauf par la force, ce qui est bien sûr improbable). Il faudrait alors que le président de la République annonce officiellement le retrait de la France . La procédure interne pourrait être calquée, selon le principe juridique de parallélisme des formes, sur la procédure requise pour ratifier les traités (référendum, vote du Parlement) . A supposer que la sortie soit alors décidée, il faudrait en négocier les modalités avec les anciens partenaires.

Avec quelles conséquences ? Une énumération détaillée étant impossible, citons les plus marquantes:
- Perte de marchés entraînant hausse du chômage et perte de richesse nationale de 10 à 15% , selon les estimations (1) .La France réalise en effet 62% de ses échanges avec ses partenaires de l'Union européenne , la part de l'Europe dans le commerce extérieur de la France n'ayant cessé de croître au cours de ces dernières décennies (près de vingt points depuis les années soixante, c'est-à-dire au fur et à mesure que progressait l'intégration communautaire) (2). Cette évolution a largement profité à la France dont le solde des échanges avec les pays de l'Union (rapport des exportations aux importations) est largement excédentaire (80 milliards de francs en 1999) (3). Un quart des emplois français dépend de l'exportation (4). Voilà ce qui serait remis en cause par un désengagement de la France. Faut-il s'étonner si le MEDEF a estimé que " le programme présenté aux électeurs par le candidat du Front National dans le domaine économique et social provoquerait une régression économique profonde…une montée forte du chômage, une crise financière sans précédent, une poussée inflationniste, un appauvrissement de tous, des tensions sociales explosives " (5) ?
- Perte d'influence : outre le coût financier important que représenterait la nécessité de fabriquer à nouveau des pièces et des billets en francs, la sortie de la monnaie unique ne restaurerait pas le prestige du franc, estiment les économistes .Le franc deviendrait une monnaie satellite , position reflétant l'affaiblissement politique de la France, isolée, rendue à son statut de puissance moyenne sans influence dans un monde dominé par les Etats-Unis. A contrario, le rôle protecteur de l'inclusion dans la monnaie unique a été maintes fois souligné pour observer que les résultats du premier tour des présidentielles françaises auraient été,en d'autres temps,accompagnés d'une attaque du franc par les spéculateurs.L'existence de l'euro a rendue impossible cette attaque.
- Blocage : préférence nationale ,rétablissement des droits de douane…la mise en œuvre de ces principes alors que l'essentiel de la législation économique est de source européenne ou internationale (ex :règles de l'OMC) conduirait à la paralysie totale et isoleraient la France non seulement de l'Europe mais de l'ensemble des organisations régissant l'économie mondiale, la cantonnant dans une autarcie invivable dans l'économie ouverte que nous connaissons.

Ce ne sont que quelques unes des conséquences auxquelles conduiraient les propositions du front national si elles étaient appliquées.

Sans oublier cette autre, dévastatrice, qui serait de mettre fin au rêve européen, celui de la construction d'un avenir commun de prospérité et de paix entre des peuples qui jusque là n'avaient que trop souvent partagé un passé sanglant. Il est largement temps que les citoyens se réapproprient ce rêve, en réponse aux dérives technocratiques et ultra-libérales des uns, nationalistes et anti-démocratiques des autres.


 


1- Voir l'intervention des Commissaires européens P.Lamy et M.Barnier dans l'émission de France-Inter " Question directe " du lundi 29/03/2002. Egalement:" La France peut-elle sortir de l'Union européenne ? ",site TF1,24/04/2002
2 - Voir le site du Ministère des Affaires étrangères français : www.diplomatie.gouv.fr (thema, dossiers : " Echanges extérieurs de la France ")
3 -" Echanges extérieurs de la France en 1999 ", INSEE Première, n°719, juin 2000
4 -"Question directe " du 29-4-2002
5 - AFP,Dépêche du 29-04-2002

 

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  • Conclusions des avocats généraux

 

 

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