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Commentaire du traité de Lisbonne - X

 

LES POSSIBILITES D'EVOLUTION DANS LE TRAITE DE LISBONNE

 

Le traité modificatif a été présenté par les partisans d’une plus grande intégration européenne comme un traité décevant, notamment en raison de l’abandon de l’ambition « constitutionnelle ». Les mécanismes nouveaux comme le système de freinage ou le contrôle de subsidiarité renforcé font craindre une stagnation du projet européen, contraire au rêve fédéral de certains.

Mais le traité de Lisbonne contient aussi un certain de clauses qui permettent d’adapter les règles de fonctionnement sans avoir à passer par une procédure de révision nécessairement plus compliquée et aléatoire, et faire évoluer l’Union européenne.

Les coopérations renforcées 

Il s’agit sans doute du mécanisme le plus connu. On parle quelquefois d’"Europe à plusieurs vitesses" ou à plusieurs cercles. Une coopération renforcée permet à une partie des états membres d’aller plus loin dans l’intégration et de collaborer dans des domaines non prévus par le traité.

Le recours à cette possibilité qui existe déjà, et avait été repris par le traité constitutionnel, est facilité par le traité de Lisbonne. Une coopération renforcée nécessitait pour être lancée la participation d’un tiers des états (9 dans une Union à 27, donc). Le traité de Lisbonne dispose que  le nombre requis d’États est fixé à neuf sans exiger par ailleurs la participation d’un tiers des pays (article 21§22 du traité de Lisbonne, numéroté 20 du TUE dans la version consolidée,  2§277 et 278 du traité de Lisbonne, numérotés 280A et suivants et 326 à 334 du TFUE dans la version consolidée). L’autorisation de lancer la coopération renforcée est donnée par le Conseil qui vote à la majorité qualifiée. La Commission européenne et le Parlement européen ont un droit de veto (NB : cela signifie que les députés des pays non concernés par la coopération renforcée votent aussi, ce qui peut faire obstacle à la mise ne place de la coopération renforcée)  et participent au fonctionnement de la coopération renforcée avec tous leurs membres. Une procédure particulière est définie en matière de Politique extérieure et de sécurité commune, le Conseil statuant à l’unanimité et la Commission et le Parlement européen étant consultés.

La clause de flexibilité 

L’article 308 du traité de Lisbonne (actuel article 308 du traité actuel sur la CE et article 352  dans la nouvelle numérotation des traités consolidés) permet à l’Union européenne  de mener une action non prévue par les traités, si elle apparaît nécessaire pour atteindre l’un des objectifs visés par ceux-ci .

Si les traités actuels comportent une clause de ce type, elle est libellée de façon plus restrictive :   l’article 308 du traité sur la CE dispose en effet : «  Si une action de la Communauté apparaît nécessaire pour réaliser, dans le fonctionnement du marché commun, l’un des objets de la Communauté, sans que le présent traité ait prévu les pouvoirs d’action requis à cet effet, le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, prend les dispositions appropriées » .

La nouvelle rédaction de l’article 308 dans le traité de Lisbonne permet en revanche une action plus large puisqu’il n’y est plus fait référence au fonctionnement du marché intérieur, mais aux politiques de l’Union (à l’exception cependant de la politique étrangère et de sécurité commune). Mais il introduit aussi une restriction par rapport à la rédaction de l’article 308 aujourd’hui en vigueur en précisant que les mesures définies sur la base de la clause de flexibilité ne peuvent avoir pour but d’harmoniser les législations nationales si cette harmonisation est exclue par les traités. L'article est ainsi rédigé dans le traité modificatif :

« 1. Si une action de l'Union paraît nécessaire, dans le cadre des politiques définies par les traités, pour atteindre l'un des objectifs visés par les traités, sans que ceux-ci n'aient prévus les pouvoirs d'action requis à cet effet, le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission et après approbation du Parlement européen, adopte les dispositions appropriées. Lorsque les dispositions en question sont adoptées par le Conseil conformément à une procédure législative spéciale, il statue également à l'unanimité, sur proposition de la Commission et après approbation du Parlement européen.

2. La Commission, dans le cadre de la procédure de contrôle du principe de subsidiarité visée à l'article 3ter, paragraphe 3, du traité sur l'Union européenne, attire l'attention des parlements nationaux sur les propositions fondées sur le présent article.

3. Les mesures fondées sur le présent article ne peuvent pas comporter d'harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres dans les cas où les traités excluent une telle harmonisation.

4. Le présent article ne peut servir de fondement pour atteindre un objectif relevant de la politique étrangère et de sécurité commune et tout acte adopté conformément au présent article respecte les limites fixées par l'article 25ter, second alinéa, du traité sur l'Union européenne ».

Les clauses passerelles

Elles permettent notamment de passer du vote à l’unanimité au Conseil au vote à la majorité qualifiée ou autre (article 1§56 du traité de Lisbonne, numéroté 48 du TUE et  48 dans la version consolidée, point 7). Pour cela il faut au préalable que le Conseil autorise, à l’unanimité, le passage au vote à la majorité (cette possibilité n’existe pas cependant pour les décisions ayant relevant du domaine de la défense). Cette décision est notifiée aux parlements nationaux. Un parlement peut s’opposer au changement de procédure de vote, ceci afin de préserver la compétence constitutionnelle des parlements d’approuver les traités (voir l’article sur le rôle des parlements nationaux).

Les clauses de révision

Elles comportent la procédure de révision ordinaire et une nouveauté : la procédure de révision simplifiée.

  • - Procédure de révision simplifiée : comme le traité constitutionnel, le traité de Lisbonne permet d’écarter la procédure, lourde, de la Conférence Intergouvernementale pour réviser les traités sur certains points. Une procédure de révision simplifiée s’applique ainsi aux politiques internes de l’Union européenne, c’est-à-dire les politiques autres que celles relatives à l’action extérieure de l’Union,  à la condition toutefois que la révision ne conduise pas à accroître les compétences attribuées à l’Union dans les traités (article 1§56 du traité de Lisbonne, numéroté 48 du TUE et  48 dans la version consolidée, point 6).  La décision de recourir à la révision simplifiée est prise par le Conseil européen statuant à l’unanimité. De plus, comme on l’a vu dans l’étude du rôle des parlements nationaux , elle doit être approuvée « par les États membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives », ce qui revient à accorder aux parlements des pays membres  un droit de veto dans la mesure où ils ont, au terme de la constitution nationale, la compétence d’approuver les traités (en France, article 53 de la Constitution).

 

  • - Procédure de révision ordinaire : elle est décidée par le Conseil européen à la majorité simple après consultation du Parlement européen et de la Commission. Elle nécessite la réunion d’une Convention composée des représentants des parlements nationaux, des chefs d’Etat et de gouvernement des Etats membres, du Parlement européen et de la Commission (comme cela avait été le cas de la Convention qui avait rédigé le traité constitutionnel). La Convention adopte ensuite adopte par consensus une recommandation à une Conférence des représentants des gouvernements des États membres - CIG - qui est l’instance souveraine pour adopter les modifications des traités. L’innovation est  le recours à la Convention qui permet  d’associer les autres institutions, et en particulier, les représentants des peuples à la révision des traités.La convocation de la Convention peut être cependant écartée par le Conseil statuant à la majorité  « lorsque l'ampleur des modifications ne le justifie pas  ». Le Conseil fixe alors le mandat de la CIG.  Il reste à savoir où se situe la ligne de démarcation entre les révisions majeures et les révisions mineures. La consultation obligatoire du Parlement européen par le Conseil si celui-ci décide de ne pas convoquer une Convention peut jouer un rôle de modération si le Conseil était tenté de faire une utilisation abusive de cette prérogative. L’article 48 reprend enfin une disposition du traité constitutionnel au terme de laquelle «  Si à l'issue d'un délai de deux ans à compter de la signature d'un traité modifiant les traités, les quatre cinquièmes des États membres ont ratifié ledit traité et qu'un ou plusieurs États membres ont rencontré des difficultés pour procéder à ladite ratification, le Conseil européen se saisit de la question  ».

 

11/02/2008

 

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