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Sanctions de l’Union Européenne contre Poutine, jusqu’où ?

 

stand with ukraine

 

 

A la suite de l’agression de Vladimir Poutine contre l’Ukraine, le Conseil européen (réunion des 27 chefs d’Etat de l’Union européenne) a décidé hier une série de sanctions dont le but déclaré est de  faire plier l’économie russe et les oligarques russes, d’isoler et d’assécher financièrement la Russie. Il s’agit d’une première série de sanctions. D’autres devraient suivre si Vladimir Poutine poursuit sa guerre, ce qui est vraisemblable.

 

Les premières sanctions
 

Les sanctions sont d’abord individuelles et visent en premier lieu Vladimir Poutine et son Ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, dont les avoirs vont être gelés. L'UE a décidé de sanctionner également les membres du Conseil de sécurité nationale de la Fédération de Russie qui ont soutenu la reconnaissance immédiate par la Russie des deux zones Donetsk et Oblasts de Louhansk en Ukraine en tant qu'entités indépendantes. Il en est de même pour les membres de la Douma d'État russe, qui ont ratifié la décision gouvernementale du Traité d'amitié, de coopération et d'assistance mutuelle entre la Fédération de Russie et les deux entités. Enfin, les sanctions ciblent les personnes qui ont facilité l'agression militaire russe depuis la Biélorussie.
 

Des sanctions économiques ont aussi été adoptées, dans différents secteurs :
 

- Sanctions financières : elles consistent à couper l'accès de la Russie aux marchés de capitaux les plus importants, à interdire la cotation et la fourniture de services liés aux actions d'entités publiques russes sur les plates-formes de négociation de l'UE. Par ailleurs, sont interdites l'acceptation de dépôts dépassant certaines valeurs de la part de ressortissants ou de résidents russes, la tenue de comptes de clients russes par les dépositaires centraux de titres de l'UE, ainsi que la vente de titres libellés en euros à des clients russes.
Ces sanctions visent 70 % du marché bancaire russe et les principales entreprises publiques, y compris dans le domaine de la défense. L’objectif est d’augmenter les coûts d'emprunt pour la Russie, d’augmenter l’inflation et d’éroder la base industrielle du pays. Les avoirs de l’élite russe (les oligarques) dans l’UE sont traqués.

En France, les services mobilisés sont la Direction générale des Finances publiques (DGFIP) et TRACFIN (service de renseignement financiers qui participe à la lutte contre les circuits financiers clandestins, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme). Ces services ont été chargés par le Ministre de l’Economie et des Finances et de la Relance d’identifier tous les comptes bancaires, biens immobiliers, bateaux, etc…des proches du pouvoir et oligarques russes sous sanctions afin de les priver de l’usage de ces biens.

- Sanctions dans le secteur énergétique : interdiction de la vente, de la fourniture, du transfert ou de l’exportation vers la Russie de biens et de technologies spécifiques dans le domaine du raffinage du pétrole et restrictions sur la fourniture de services connexes. L’objectif est de fragiliser le secteur pétrolier russe (24 milliards d'euros d’exportations en 2019) et d'empêcher la Russie de moderniser ses raffineries de pétrole.

 

- Sanctions dans le secteur des transports : interdiction d'exportation visant les biens et technologies dans l'industrie aéronautique et spatiale, et interdiction de la fourniture de services d'assurance et de réassurance et de maintenance liés à ces biens et technologies. Il en est de même pour la fourniture d'une assistance technique et financière connexe.
L’objectif est de mettre à mal un des secteurs clés de l'économie russe et de la connectivité du pays, puisque les trois quarts de la flotte aérienne commerciale actuelle de la Russie ont été construits dans l'UE, aux États-Unis et au Canada.

 

- Sanctions dans le secteur technologique : renforcement des restrictions sur les exportations de biens et de technologies à double usage (susceptibles d'avoir une utilisation tant civile que militaire), ainsi que des restrictions sur les exportations de certains biens et technologies qui pourraient contribuer à l'amélioration technologique du secteur russe de la défense et de la sécurité.
 

- Visas : les diplomates, les autres fonctionnaires russes et les hommes d'affaires ne pourront plus bénéficier des dispositions de facilitation des visas, qui permettent un accès privilégié à l'UE.

 

Exclusion de la Russie de SWIFT ?

 

L’une des sanctions évoquées, sans que jusqu’ici une décision ait été prise (mais la situation évolue rapidement) est d’exclure la Russie du réseau SWIFT.
 

Créée en 1973, SWIFT (Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication) est une coopérative bancaire dont le siège est en Belgique. Elle est dirigée par un conseil de 25 administrateurs désignés par les adhérents (banques). SWIFT fournit un système de traitement des opérations bancaires internationales à travers une messagerie sécurisée entre les banques. Pour résumer, le système fonctionne ainsi : un client d’un pays achète un produit vendu par un commerçant d’un autre pays. Sa banque débite le montant de son achat sur son compte et elle envoie un message à la banque du commerçant pour la prévenir de la transaction. Le message est envoyé par l’intermédiaire de Swift qui en assure également la sécurisation. Une fois que le message est reçu par la banque du commerçant, elle vire l’argent sur le compte de ce dernier. A noter que les ordres de paiement ne sont pas les seules opérations traitées par l’intermédiaire de SWIFT qui sert d’intermédiaire pour d’autres activités bancaires comme des opérations sur titre ou des transactions de trésoreries. Que se passe-t-il si une banque n’a pas accès à SWIFT ? Elle n’a pas de garantie que l’ordre qu’on lui demande d’exécuter est valide, pas plus que l’opération. En d’autres termes, les banques sont très dépendantes de ce système car il leur permet d’exercer leur métier en toute confiance et rapidement.
 

Aujourd'hui 11 000 institutions financières utilisent SWIFT et parmi elles environ 300 institutions financières russes. L’idée est donc émise de couper l’accès de SWIFT aux banques et autres institutions financières russes. Cela ne les empêcherait pas de fonctionner (les moyens « anciens » que sont le téléphone, l’email, ou le courrier existent toujours), mais cela désorganiserait les échanges financiers.
 

Si certains n’hésitent pas à qualifier l’exclusion de la Russie du système bancaire Swift d’"arme nucléaire financière" contre Moscou, image largement reprise, d’autres se montrent plus sceptiques quant à son effet vraiment dissuasif. La Russie se serait préparée à cette hypothèse et développerait une messagerie parallèle sécurisée. Dans la déferlante de nouvelles plus ou moins fiables, difficile de savoir ce qu’il en est. Mais une certitude est que l’exclusion de SWIFT associée aux autres sanctions serait un coup très dur pour l’économie russe. Encore faut-il qu’elle soit mise en œuvre. Et jusqu’à une date récente les pays de l’UE étaient divisés sur la question. Ces dernières heures, l’Allemagne serait encore le seul pays à s’opposer à cette mesure de peur de subir des représailles de la part de la Russie. Sous la pression de ses partenaires, elle peut changer de position.


SWIFT, une coopérative dirigée par des administrateurs indépendants des états, est apolitique officiellement. Mais elle explique sur son site qu’elle exécute les sanctions internationales. Donc, il est probable que si l’UE décide d’interdire l’accès des banques russes au système, les administrateurs de SWIFT suivront.

 

La résistance ukrainienne et la protestation des citoyens russes courageux, et des journalistes, qui s’opposent au dictateur méritent bien un peu de courage et de détermination de la part des occidentaux.

 

 

 

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  • Conclusions des avocats généraux

 

 

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