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FAQ Droits - Recours

Dernière mise à jour: 9 avril 2020



QUELS SONT LES RECOURS POUR FAIRE RESPECTER LES DROITS CONFERES PAR LE DROIT COMMUNAUTAIRE?

Comme c'est le cas au plan interne, on distingue les recours contentieux des ceux qui n'ont pas ce caractère. Au nombre des voies non contentieuses, on trouve la plainte à la Commission européenne, la pétition au Parlement européen, le recours au Médiateur. Les voies contentieuses sont, elles, plus indirectes, puisque le principe est qu'un particulier ne peut pas saisir directement la Cour de Justice de l'Union européenne, ce qui n'exclue pas que des moyens d'action existent.

Cependant un droit de recours direct est introduit par le traité de Lisbonne. L'article 263, al.4 dispose: "Toute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas, un recours contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d'exécution".

 

COMMENT INVOQUER LE DROIT COMMUNAUTAIRE DEVANT UN JUGE?

Le droit communautaire peut être invoqué pour contester la validité d'une norme nationale et ainsi faire échec à celle-ci : à l'occasion d'un litige, un particulier peut ainsi objecter que la réglementation que l'on veut lui appliquer ou que l'on lui reproche d'avoir violé est contraire au droit communautaire. Il peut s'agir, par exemple, de la mise en cause d'un impôt ou d'une taxe, d'un refus de prestation sociale, d'une réglementation des conditions de travail, etc...Le juge a alors l'obligation de se prononcer sur cette question et, en cas de doute sur l'interprétation qu'il convient de donner à la règle communautaire, il peut renvoyer l'affaire devant la Cour de justice des Communautés Européennes pour que celle-ci procède à cette interprétation. Le juge national est lié par l'arrêt de la Cour. La possibilité de poser une question préjudicielle existe à tout moment d'un procès, meme en appel, en cassation ou devant une juridiction administrative. Le juge est libre d'apprécier l'opportunité de renvoyer l'affaire devant la juridiction communautaire. Toutefois, si une parties est en désaccord avec la décision prise, elle peut interjeter appel. Si une question préjudicielle est posée à la CJUE, les débats sont suspendus en attendant la réponse de la Cour. Par ailleurs, un recours en annulation est ouvert au citoyen à condition que la décision (ou l'absence de décision) attaquée le concerne directement et individuellement ou qu'il en soit le destinataire.

 

INTERET A AGIR

Une association de protection de l'environnement (Greenpeace, en l'occurrence) est-elle recevable à former un recours en annulation contre une décision de la Commission? L'article 173 (devenu l'article 263) du traité CE prévoit que toute personne morale ou physique peut saisir le juge communautaire d'un tel recours à condition d'être directement et individuellement concernée par l'acte qu'elle conteste. Greenpeace a été débouté en première instance, le tribunal ayant fait application de la jurisprudence de la Cour de la justice des Communautés Européennes selon laquelle un particulier doit appartenir à un "cercle fermé" pour être individuellement concerné par une décision et donc admis à la contester. En l'espèce, la décision en cause concernait l'environnement (octroi de subventions communautaires à la construction de centrales électriques aux Canaries). Greenpeace faisait valoir que dans ce domaine les intérêts sont par nature partagés et les droits sont susceptibles d'être détenus par un grand nombre d'individus, de sorte que la condition d'appartenance à un cercle fermé ne peut être remplie. Mais cet argument n'a pas été retenu par le juge.

 

INTERET A AGIR

L'accès à la justice communautaire n'est guère facile pour un particulier. Mais un arrêt du TPI du 3 mai 2002 a ouvert la voie à un assouplissement . Une société française d'armement à la pêche contestait un règlement de la Commission relatif au maillage des filets de pêche. Elle en demandait l'annulation partielle au Tribunal. La Commission avait soulevé une exception d'irrecevabilité fondée sur le fait que pour qu'un recours en annulation soit recevable, il faut que le texte incriminé concerne directement et individuellement celui qui le conteste, ce qui n'était pas le cas en l'espèce, la société requérante n'étant pas individuellement concernée par un règlement de portée générale. Mais le Tribunal rejette l'exception d'irrecevabilité en élargissant la notion de personne " individuellement concernée". Désormais, une personne (physique ou morale, particulier ou entreprise) sera considérée comme étant individuellement concernée par une disposition communautaire de portée générale la concernant directement si celle-ci affecte d'une manière certaine et actuelle, sa situation juridique en restreignant ses droits ou en lui imposant des obligations. On le constate, cet arrêt assouplit réellement les conditions d'accès à la justice communautaire des particuliers et des entreprises. Le Tribunal a justifié sa décision par le souci de mieux protéger les droits de ces derniers conformément à l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et aux exigences d'un état de droit. On remarquera la référence à la Charte qui bien qu'elle n'ait pas encore été formellement intégrée aux traités constitutifs de l'Union, s'impose ici comme une source du droit communautaire.

(TPI, arrêt du 03/05/2002, aff.T.177/01, Jégo-Quéré et Cie SA/Commission des Communautés Européennes, bull.n°13/02)

 

INTERET A AGIR (suite)

Le jugement du TPI qui assouplissait les conditions d'accès des particuliers et des entreprises à la justice communautaire (voir commentaire précédent) a été annulé par la Cour de justice des Commununautés européennes. Dans son arrêt, la Cour rappelle tout d'abord que le Traité a établi un système complet de voies de recours et de procédures destiné à assurer la protection effective des droits que les citoyens tirent de l'ordre juridique communautaire et dans le cadre duquel les particuliers directement et individuellement concernés par un acte communautaire ont la possibilité de le contester directement devant le juge communautaire par le biais d'un recours en annulation. En vertu d'une jurisprudence traditionnelle, une personne physique ou morale ne peut être considérée comme étant individuellement concernée par une telle disposition à portée générale comme une règlement "que si celle-ci l’atteint en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, l’individualise d’une manière analogue à celle d’un destinataire". Or, tel n'est pas le cas pour la société Jego-Quéré, estime la Cour qui relève que le fait qu'elle soit le seul opérateur pêchant le merlan dans les eaux au sud de l’Irlande avec des navires de plus de 30 m n’est pas de nature à l’individualiser, dès lors que les articles dont elle demande l'annulation ne la concernent "qu’en raison de sa qualité objective de pêcheur de merlan utilisant une certaine technique de pêche dans une zone déterminée, au même titre que tout autre opérateur économique se trouvant, actuellement ou potentiellement, dans une situation identique" . En outre, ajoute la Cour, il n’apparaît pas qu’une disposition de droit communautaire imposait à la Commission, pour adopter le règlement contesté, de suivre une procédure dans le cadre de laquelle Jégo-Quéré aurait eu le droit de revendiquer d’éventuels droits, dont celui d’être entendue. Ainsi, le droit communautaire n’a pas défini une position juridique particulière en faveur d’un opérateur tel que Jégo-Quéré au regard de l’adoption de ce règlement. Enfin, rappelle la Cour, les particuliers peuvent contester les actes de portée générale devant les juridictions nationales en demandant à celles-ci d'interroger la CJCE, par le biais du renvoi préjudiciel, sur la conformité des mesures d'application nationale au droit communautaire. Et à cet égard, il est de la responsabilité des Etats membres de mettre en place les systèmes de voies de recours permettant aux particuliers de contester en justice la légalité de toute mesure nationale relative à l'application d'un acte communautaire de portée générale. La juridiction communautaire n'est pas compétente, lorsqu'elle est saisie d'un recours en annulation, pour examiner si cette protection est effectivement garantie par le système national ni, pour admettre la recevabilité directe du recours du particulier si tel n'est pas le cas. Car cela conduirait le juge communautaire à interpréter le droit procédural national et donc à excéder ses compétences.

(CJCE, 1er avr. 2004, aff. C-263/02 P, Commission c/ Jégo-Quéré)

 

INTERET A AGIR

 
Une action en annulation engagée par le destinataire d’un acte peut être poursuivie par l’ayant-cause à titre universel de celui-ci, notamment dans le cas du décès d’une personne physique. L’ayant-cause à titre universel peut aussi poursuivre une action en indemnisation d’un préjudice moral que le défunt aurait subi, si ce dernier avait réclamé le bénéfice de cette action à son profit avant de décéder, de sorte que cette action figurait dans son patrimoine au jour de la succession.

Dans le cas d’espèce, un ayant-cause à titre universel le droit de poursuivre l’instance engagé par le demandeur décédé pour obtenir l’annulation de décisions de la Commission rejetant des demandes d’accès à des documents et de transfert des données à caractère personnel ainsi que réparation du préjudice allégué.

CJUE, 27 novembre 2018, aff.C et T-435/16, VG, en qualité d’héritière universelle de MS contre Commission européenne
 

INTERET A AGIR DES PARTICULIERS: INVOCABILITE DES DISPOSITIONS D'UNE DIRECTIVE
 

Les personnes physiques et morales directement concernées par la pollution d’eaux souterraines peuvent se prévaloir, devant les juridictions nationales, de certaines dispositions de la directive 91/676.
C’est ce qu’a jugé la Cour de Justice de l’Union Européenne dans un arrêt récent.

 

En l’espèce, un particulier, propriétaire d’une fontaine domestique, se plaignait de la pollution des eaux souterraines dans sa région, dont la teneur en nitrates dépassait régulièrement le seuil de 50 mg/l prévu par la directive sur les nitrates. Une commune, exploitant une fontaine municipale, avait introduit un recours sur la base du même grief.
 

La Cour a jugé que le dépassement du seuil de 50 mg/l gêne l’utilisation normale des eaux et nécessite la mise en œuvre de mesures de dépollution par les détenteurs des sources. Ces personnes sont donc directement concernées par la violation de l’objectif principal de la directive et doivent pouvoir saisir les autorités et juridictions nationales pour obtenir que les états respectent les prescriptions de la directive. Ce qui implique pour les états de mettre fin à la pollution et de contrôler étroitement l’état des eaux dans le cadre de programmes de surveillance.
L‘obligation de mettre fin à la pollution est claire, précise et inconditionnelle. Elle peut, par conséquent, être invoquée directement par les particuliers à l’encontre des état membres.

 

CJUE, 3 octobre 2019, aff.C-197/18, Wasserleitungsverband Nördliches Burgenland, Robert Prandl, Gemeinde Zillingdorf

 

QU'EST-CE QUE LA PLAINTE A LA COMMISSION EUROPEENNE?

Toute personne peut mettre en cause une pratique ou une mesure (législative ou autre) imputables à un état et qu'elle estime contraire au droit communautaire. Ce peut être également le cas d'une entreprise qui s'estime victime de concurrence déloyale de la part d'autres entreprises.Cette plainte peut être formulée par lettre, mais il est plus simple d'utiliser le formulaire préétabli, élaboré par les services de la Commission qui permet de préciser l'objet de la plainte, l'organisme fautif, les démarches déjà faites par le plaignant, les preuves ou élements de preuve. Pour que la plainte soit étudiée par la Commission européenne, il n'est pas exigé de démontrer un intérêt. La Commission européenne étudie et apprécie la plainte et, si elle l'estime fondée, elle peut saisir la Cour de justice pour faire constater et sanctionner la violation du droit communautaire. En toute hypothèse, le plaignant est informé de la suite donnée à sa plainte.

 

QU'APPELLE-T-ON LE DROIT DE PETITION?

Depuis le traité de Maastricht de 1992, il est possible d'adresser une pétition au Parlement européen : celui-ci la transmet à la Commission pour qu'elle propose une solution ou qu'elle saisisse la Cour s'il y a une violation du droit communautaire. Il n'y a aucun formalisme particulier : la pétition est sur papier libre et indique les coordonnées de l'auteur.

 

QUEL EST LE ROLE DU MEDIATEUR EUROPEEN?

Le Médiateur européen peut être saisi en cas de mauvaise administration imputable aux institutions communautaires (sauf la Cour de justice et le Tribunal dans l'exercice de leur fonction juridictionnelle). Il en est ainsi en cas, par exemple, d' irrégularités administratives, d' inéquité, de discrimination, abus de pouvoir, d'absence ou de refus d'information, de retards injustifiés... Le Médiateur fait une enquête et négocie pour régler le litige à l'amiable. Les limites à son rôle sont qu'il n'intervient pas sur des affaires examinées par des tribunaux et qu'il n'a pas de pouvoir de décision. Il peut être saisi par l'intermédiaire d'un député européen ou directement par lettre précisant le motif de la plainte et l'identité du plaignant qui peut rester confidentielle. Il existe un formulaire préétabli. La plainte doit être introduite dans les 2 ans de la date à laquelle le plaignant a eu connaissance des faits.

 

 

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  • Commentaires de décisions de la Cour de Justice de l'Union Européenne et d'arrêts du Tribunal,
  • Conclusions des avocats généraux

 

 

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