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Le débat sur l’endettement et les ressources propres de l’Union européenne ne fait que commencer

 

 

Vote au Parlement européen

Vote au Parlement européen

© European Union 2023 - Source : EP

 

 


Un endettement mutualisé de 750 milliards d’euros doit financer le Plan de relance de l’Union européenne décidé le 21 juillet 2020. La Commission européenne a emprunté et emprunte sur les marchés financiers au nom de l’Union européenne et redistribue une partie de ces sommes aux Etats sous forme de subventions, l’autre partie, sous forme de prêts pour les aider à réaliser leurs propres plans. Mais comment l’UE va-t-elle rembourser ces sommes à ses créanciers ? C’est la question posée par le Parlement européen à l’occasion d’un débat sur les ressources propres de l’UE.
 

 

Quelles ressources pour les dépenses communautaires ?

Au moment de l’adoption du Plan de relance, le Parlement européen et le Conseil se sont mis d’accord sur la nécessité d’augmenter les ressources propres de l’Union européenne pour lui permettre de faire face à ces nouvelles dépenses. L’idée est aussi de donner plus d’indépendance financière à l’UE dont le budget dépend à l’heure actuelle en très grande partie des contributions des différents Etats. Ce qui donne lieu à des marchandages au nom du « juste retour ».
 

Le 22 décembre 2021, la Commission européenne a publié sa proposition de création de « la prochaine génération de ressources propres de l'UE ». Elles aideront à assurer le remboursement des emprunts réalisés par l'UE pour financer le volet «subventions» de NextGenerationEU et à financer le Fonds social pour le climat). Faute de quoi, il faudrait réduire les budgets d’autres programmes européens ou augmenter les contributions des Etats au budget communautaire.
 

Le coût croissant de l’endettement de l’UE

Lors du débat du 10 mai au Parlement européen, les députés se sont inquiétés des remboursements d’emprunt et des couts de la dette européenne, estimés à au moins 15 milliards d’euros par an jusqu’en 2058 en moyenne. Mais voila, cette estimation est peut-être encore trop optimiste aujourd’hui. En effet, si l’Union européenne a pu faire en juin 2021 une première émission d’obligations à un taux très bas (0,09 %) du fait de la très bonne note donnée par les agences de notation (triple A), la situation est différente aujourd’hui. Non pas que la note de l’UE ait été dégradée (elle est toujours triple A) mais les taux d’intérêt ont augmenté, et la liquidité des obligations européennes (capacité à être négociées) est plus faible que celle d’obligations émises par des pays membres. D’où une situation paradoxale dans laquelle l’UE emprunte à un taux supérieur (3,13%) à ce qu’il est pour des pays comme l’Allemagne (différence de 1 pont en pourcentage) ou même de la France ou la Belgique (différence de 0,2) (Marc Lambrechts, Des taux de l'UE supérieurs aux taux belges, L’Echo.be, 27 janvier 2023). Et ceci à un moment où l’UE doit faire face à des contraintes supplémentaires : poids économique et social de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, répercussions importantes de l’inflation sur le budget de l’UE et nouvelles demandes d’investissement pour soutenir une industrie des technologies énergétiques propres alors que la compétition mondiale bat son plein.
 

Des nouvelles ressources propres sont proposées

Pour faire face à ces défis, les eurodéputés ont voté à une marge majorité (356 voix pour, 199 voix contre et 65 abstentions) une Résolution approuvant le principe de nouvelles ressources propres. Elles seraient fondées sur :

  • l’impôt sur les sociétés,
  • la taxe sur les transactions financières,
  • un nouveau mécanisme frontalier équitable (exigeant des entreprises qui importent des marchandises sur le marché unique de l’Union qu’elles versent aux travailleurs employés dans des pays tiers dans leur chaîne d’approvisionnement mondiale un salaire journalier supérieur au seuil de pauvreté correspondant et suffisant pour leur permettre d’échapper à la pauvreté)
  • une taxe sur les crypto-actifs,
  • une redevance sur l’économie numérique
  • et des contributions nationales basées sur des statistiques ( les États membres qui mettent en œuvre « de manière résolueles politiques adoptées au niveau de l’Union » seraient avantagés).

Le Parlement européen doit jouer un rôle majeur dans le processus décisionnel des ressources propres "afin d’assurer la visibilité, la légitimité et la responsabilité démocratique des finances publiques de l’UE".


 

Critiques et polémiques

De nombreux députés ont critiqué l’opacité qui entoure l’estimation des coûts réels des emprunts de l’UE et les conséquences pour le budget de l’UE : « la Commission ne communique pas clairement sur l’ampleur de l’effet de l’augmentation des coûts d’emprunt », selon le rapporteur de la résolution, Johan Van Overtveldt du (groupe des Conservateurs et Réformistes européens - CRE). La Commission s’en défend en objectant qu’il est difficile de prévoir les taux d’intérêt sur plusieurs années, a fortiori dans un contexte instable.
 

Ce manque de transparence alimente l’opposition à la mutualisation de la dette et aux ressources propres.
 

Certains députés redoublent de critiques sur l’endettement qui pèsera sur les générations futures. Débat bien connu, en France, notamment, où la dette publique a beaucoup augmenté.
 

Sur les ressources propres, l’idée heurte tous ceux qui redoutent une évolution fédérale de l’UE qui reste encore aujourd'hui sous la tutelle des Etats notamment grâce aux contributions nationales au budget et au fait qu’elles sont plafonnées.
 

Enfin, une autre question qui n’est pas la moins importante est celle de la légitimité fiscale de l’UE. On le sait, dans une démocratie, le peuple consent à l’impôt par le biais de ses représentants élus, les parlements.
 

Mais quelle autre voie ?

La plupart des pays européens ont aujourd’hui un niveau d’endettement élevé ou très élevé, et une fiscalité déjà forte. Il est douteux qu’ils accepteraient de voir leurs contributions au budget européen augmenter. Et n'oublions pas que l'article 311 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dispose que l'UE doit se financer "entièrement sur ses ressources propres".

 

La décision relative aux ressources propres doit être approuvée à l'unanimité par le Conseil, après consultation du Parlement européen. Elle peut entrer en vigueur une fois qu'elle aura été approuvée par tous les pays de l'UE, conformément à leurs règles constitutionnelles.

 



 

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  • Commentaires de décisions de la Cour de Justice de l'Union Européenne et d'arrêts du Tribunal,
  • Conclusions des avocats généraux

 

 

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