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Vote de la directive sur la performance énergétique des bâtiments, EPBD

 


Le Parlement européen a adopté, le 12 mars 2024, la directive sur l’efficacité énergétique des bâtiments, un texte qui, s’il est voté signifiera pour tous les propriétaires immobiliers des coûts importants et dans certains cas, insurmontables, de rénovation.

La directive EPBD (son acronyme) repose sur des intentions louables puisqu’il s’agit de rendre les bâtiments compatibles avec la lutte contre le réchauffement climatique et la déperdition d’énergie. Selon les chiffres rappelés par la Commission européenne, le bâtiment représente 36% des émissions et consomme 40% de notre énergie. C’est cela qu’il faut changer.

Comment ?

Par la réduction des émissions tout d‘abord.

Avec EPBD, tout le bâti de l’UE devra être neutre en carbone en 2050. Diverses étapes sont prévues.

Tous les nouveaux bâtiments devront être à zéro émission à partir de 2030 (2028 pour les nouveaux bâtiments publics).

Pour les bâtiments résidentiels, il faudra atteindre une réduction de la consommation moyenne d’énergie primaire d’au moins 16% d’ici 2030 et d’au moins 20 à 22% d’ici 2035.

Si c’est techniquement possible et selon la taille, les bâtiments publics et non résidentiels, et tous les nouveaux bâtiments résidentiels devront être équipés d’installations solaires d’ici 2030.

L’abandon progressif des chaudières à combustibles fossiles est une autre mesure phare
Ces chaudières devront avoir disparu d’ici 2040. Le subventionnement des chaudières à combustibles fossiles autonomes sera interdit à partir de 2025.
Mais il sera encore possible de subventionner les systèmes de chauffage hybrides (ex : associant une chaudière et une installation solaire thermique ou une pompe à chaleur).

Des exemptions sont prévues
Les bâtiments agricoles et les bâtiments du patrimoine, les églises et les lieux de culte pourront être exclus des nouvelles règles.

La directive a été adoptée à une large majorité (370 voix pour, 199 contre et 46 abstentions).
Le Conseil doit l’approuver officiellement.

Le problème est celui de l’acceptation sociale. Et il est épineux.

En effet, cette directive arrive à un moment de crise de l’immobilier et du pouvoir d’achat.

En 20 ans les prix de l’immobilier ont augmenté 4 fois plus vite que les revenus bruts des ménages. Les 25 % les plus modestes consacrent deux fois plus de leurs revenus aux dépenses de logement que les 25 % les plus aisés (Oxfam, rapport, « logement : inégalités à tous les étages »)

Dans l'Union européenne,  8,3% des ménages pauvres se trouvent en situation d'impayé de loyer ou de remboursement d'emprunt immobilier,  un phénomène qui a augmenté de 20% entre 2019 et 2020, selon la Fondation Abbé-Pierre et la Fédération européenne des associations nationales travaillant avec les sans-abri (FEANTSA) (Bfmtv , 30/06/2022, « En France, 5,7% des ménages ne parvenaient plus à payer leur loyer ou leur crédit en 2020 »)

Or, la mise en œuvre de la directive EPBD exige la rénovation de 35 millions de bâtiments d’ici 2030, pour un coût de 275 milliards d’euros par an selon l’évaluation faite par la Commission européenne. Pour sa part, l’UE pourrait contribuer pour environ 150 milliards sur 10 ans ce qui est dérisoire. Et comment les états qui sont déjà très endettés comme la France vont-ils pouvoir aider les ménages ? En France, le dispositif Ma Prime Rénov’ (aides aux travaux de rénovation énergétique) pourrait faire les frais des coupes dans le budget public. Ce qui ne serait pas un bon signal.

Et, « cerise sur le gâteau », si l’on peut dire, le principe même des travaux d’isolation est remis en cause, son efficacité étant questionnée après quelques années d’expérience (exemple : Conférence d'Ester Duflo, prix Nobel d'économie 2019, au Collège de France, 27 janvier 2023, ou encore étude de deux chercheuses de l’Université de Cambridge montrant que la consommation d’énergie, cinq ans après les travaux, ne baissait pas).

 

Quelle solution ? Pour l’eurodéputé François Bellamy (PPE, démocrates chrétiens) qui suit de près ce dossier, la solution est évidente : pour décarboner le logement, il faut massivement électrifier le chauffage et donc massivement produire de l’électricité…nucléaire, moins carbonée. Une solution rejetée par d’autres, les Verts notamment).

Il n’est pas étonnant que les associations représentant les propriétaires immobiliers (L'Union internationale des propriétaires immobiliers (IUPI) ou les consommateurs (BEUC) aient exprimé des réserves. Non sur l’objectif : tout le monde adhère ou affirme adhérer à l’objectif de la neutralité climatique. Mais sur les moyens. Et toute la question est là, en effet.

 

 



 

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